L’exécutif accentue dangereusement ses pressions sur l’Assemblée nationale.
Votez-moi ça, vous serez gentils !
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CONTEXTE
En 2008, l’article 50-1 a été introduit dans la constitution lors de la réforme dite de modernisation : « Devant l’une ou l’autre des assemblées, le Gouvernement peut, de sa propre initiative ou à la demande d’un groupe parlementaire (…), faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à débat et peut, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité. »
C’est cet article qui a été utilisé par Manuel Valls pour faire valider cette semaine un plan de 50 milliards d’économies [abonnés]
Lors de sa création, l’article 50-1 a été présenté comme une mesure progressiste permettant aux députés et aux sénateurs de s’exprimer sur des sujets politiques, donc renforçant leur pouvoir. Mais on peut s’interroger sur ce qu’il induit comme conception du parlement et sur les usages possibles par l’exécutif pour transformer les assemblées en chambres décoratives. En effet, les parlementaires sont normalement là pour voter des lois, pas pour écouter les discours d’un premier ministre et légitimer sa politique par un vote sans portée législative.
Cela est particulièrement problématique à l’Assemblée nationale, et au-delà des luttes internes il faut bien entendre ce que disent les députés que la presse a désignés sous le terme ambigu de « frondeurs » : depuis sa prise de pouvoir, François Hollande n’a cessé de diriger seul, sans écouter le point de vue des parlementaires. Leurs alertes ont pourtant été constantes et répétées : à propos du traité budgétaire, du CICE, lors du vote de l’ANI, de la séparation bancaire, de la réforme des retraites, de l’augmentation de la TVA, des députés ont demandé une orientation politique plus conforme au discours du Bourget et aux engagements de campagne. En vain.
En mars 2013, nous chantions « Le Blues du Parlementaire ». Au fil des mesures antisociales et devant les pressions répétées de l’exécutif, la colère gagne de plus en plus d’élus. Mais pour l’instant, les députés socialistes qui sont en désaccord avec la politique gouvernementale se contentent de s’abstenir, ce qui limite la portée de leur position.
UN VOTE POUR RIRE
paroles et musique : la Parisienne Libérée
citation de P. Cherki
– Est-ce que vous allez tout voter ?
– Moi ça dépend de ce qui est présenté. Je suis un député de la nation, l’ensemble de l’Assemblée nationale forme la représentation nationale. Nous ne sommes pas les collaborateurs techniques du Président de la République ! Tout ne part pas du Président de la République, c’est nous qui consentons à l’impôt. Nous avons fait la révolution française pour que les députés, les représentants de la nation et du peuple, puissent consentir à l’impôt. (…) Je fais partie d’une majorité à partir du moment où cette majorité est écoutée et respectée. Si quand le Président de la République dit quelque chose, ça devient parole d’évangile, moi je dis non ! Je ne suis pas dans un régime monarchique, je suis un républicain.
Une assemblée consultative
Des députés pour faire joli
Des lois conformes aux directives
Votez-moi ça, vous serez gentils
Une chambre basse qui reste en bas
Et n’use pas de son initiative
Faut se tenir au-dessus du débat
Dans l’assemblée décorative
Allez, c’est juste un vote pour rire
Juste un scrutin comme ça
Fais-moi un grand sourire
Et appuie… sur ce bouton là !
Un bien gentil Palais-Bourbon
Avec le petit doigt rangé
Contre la couture du pantalon
Tout prêt à se faire inspecter
Un régiment de majorité
Sachant plier ses convictions
Oublieux de sa souveraineté
Un bon toutou à sa Nation
Allez, c’est juste un vote pour rire
Juste un scrutin comme ça
Fais-moi un grand sourire
Et appuie… sur ce bouton là !
Sous la couronne encore dorée
Du Roi de notre République
Il devient très rare de croiser
Une idée qui soit politique
Ça fait le bonheur des corbeaux
Qui tournent au-dessus de l’État
En s’accaparant nos impôts
Et en promettant des emplois
Et puis c’est juste un vote pour rire
Juste un scrutin comme ça
Fais-moi un grand sourire
Et appuie… sur ce bouton là !
Le Prince et ses preux Chevaliers
Font la leçon à leurs manants
Sans honte aucune de les priver
Pour gaver des amis gourmands
Le premier qui ose critiquer
Se fera traiter de djihadiste
Le Parti est organisé
Y a plus de social, mais y a des listes…
Tu vois, c’est juste un vote pour rire
Juste un scrutin comme ça
Fais-moi un grand sourire
Et appuie… sur ce bouton là !
Gentils élus, braves godillots
Paraphez-moi vite ce grimoire
Ne lisez pas, c’est bien trop gros
Il y en a pour cinquante milliards
Oui, on va baisser les salaires
Mettre un coup de latte à la Sécu
Mais qu’est-ce que ça peut bien vous faire
Dans trois ans vous n’y serez plus !
Et puis c’est juste un vote pour rire
Juste un scrutin comme ça
Fais-moi un grand sourire
Et appuie… sur ce bouton là !
Allez, fais-moi un grand sourire
Et appuie sur ce bouton là !
CITATION
Pascal Cherki – BFMTV – 23.04.14